http://www.la-croix.com/Actualite/France/De-la-diplomatie-a-la-cafeologie-2015-07-14-1334444
« Je suis née ‘‘nez’’. L’odorat est le sens qui a toujours prédominé dans ma vie. »En manière de carte de visite, Madame l’ambassadeur du Guatemala, en poste à Paris de 1996 à 2000 (après la Suisse, le Portugal et l’Unesco), affiche ses compétences. Gloria Montenegro a lâché la diplomatie pour se lancer dans des recherches approfondies sur le café.
De son enfance au milieu de six frères et sœurs, elle avait conservé le souvenir des gouttes de café versées sur son lait froid et l’image de cette pointe noire qui se répandait à la surface sans se mélanger à ce corps étranger. « L’apparence comme le goût changeait tout le temps. Cette modification me rendait curieuse. Et j’aimais croquer son fruit qui ressemble à une cerise. »
Gloria Montenegro rappelle quelques données : 70 pays tropicaux de production, cinq millions de plantations, 1 000 fruits alentour. « Le café n’aime pas être seul, il pousse dans la bio-diversité, se marie fort bien avec les mets sucrés et salés. Mais confondu avec l’argent, il est devenu un produit boursier. On a oublié que, bien travaillé, il pouvait être un grand cru. »
La rétro-olfaction, seul gage de qualité pour un café
Fondatrice en janvier 2001 de la caféologie, « l’art de la dégustation visuelle, olfactive et gustative de cafés fins à partir de terroirs d’appellation », elle a lancé une Académie qui expertise des échantillons de café, inédits en France, et propose des formules d’enseignement pour amateurs et de perfectionnement pour professionnels.
Il y a dix ans, elle a ouvert, avec son mari, une boutique de torréfaction, sur le modèle des anciennes brûleries de quartier, et de dégustation, petit dédale de salons pour consommer dans des ambiances différentes. Sa Caféothèque demeure le lieu de référence pour la nouvelle génération de baristas.
« Le seul gage de qualité pour un café, affirme-t-elle, reste la rétro-olfaction. Le goût en bouche est porteur de réminiscences. Il fait basculer le présent vers le passé dans un processus de mémoire involontaire. Si son terroir est nourrissant, si son producteur prend soin de lui, il a tout pour s’affirmer comme un produit complet : douceur, équilibre, corps et fin de bouche. »
Conteuse, philosophe, hédoniste, Madame l’ambassadeur est intarissable :« Mon maître, c’est le café. Il a un message à transmettre. Mais il a perdu le droit à la parole. Je l’ai écouté. Je le trouve consolateur, extravagant, sensuel, joyeux. On appelle ses racines les ‘‘mangeuses’’. Elles dévorent les fragrances de la terre. Si le parfum est un cocktail de senteurs assemblé par l’homme, le café est le produit d’un assemblage de senteurs venues de la terre. »